LA STUPÉFIANTE MACHINE D’ANTICYTHÈRE, GRÈCE
Un mécanisme complexe daté de plus de 2.000 ans.
Cet objet mesure 11,25cm de diamètre et ces images ont été réalisées à l’aide de rayons X. (© Antikythera Mechanism Research Project)
Revenons au moment où Derek Price le découvre : on pense à cette époque qu’il ne s’agit que d’un fragment de machine. Mais convaincu par son importance, il passera le reste de sa vie à l’étudier.
Comme nous le raconte le physicien et historien des sciences et techniques Grec Yanis Bitsakis, membre du Projet de Recherche de la Machine d’Anticythère : « En 1950 et 1960, on ne voit que l’extérieur des fragments (…) dans les années 70, où Derek Price a la chance de travailler avec un physicien nucléaire du centre de recherche nucléaire d’Athènes qui fait faire des radios des fragments de la machine d’Anticythère… Et là, c’est une surprise énorme parce qu’on découvre dans le fragment principal, 30 roues dentées, et les dents sont très biens visibles sur les radios ».
Ce qui confirme l’intuition de Derek Price, l’objet se révélant être l’élément principal d’un mécanisme complexe et non un « simple » fragment. Mais les radios faisant apparaître tout l’intérieur de l’objet sur un même plan, le cliché ne permet pas de comprendre totalement son fonctionnement… Il faudra encore attendre plusieurs décennies avant que la technologie permette de le scanner tranche par tranche, dans sa profondeur.
Lorsque l’on garde à l’esprit que ce mécanisme a été fabriqué il y a 2.000 ans, la modernité de sa conception surprend.
Ce mécanisme permet de représenter le ciel à un moment donné ou de déterminer une date à partir d’une configuration particulière du ciel. Il règle tous les mouvements des planètes visibles, du soleil et de la lune et en un seul mouvement, tourner la manivelle fait tourner l’ensemble du ciel jusqu’au moment qui nous intéresse. Selon Yanis, « c’est une représentation miniature et mécanique du cosmos. C’est à dire, ce qu’on appelle maintenant le système solaire ».
Lorsque l’on garde à l’esprit que ce mécanisme a été fabriqué il y a 2.000 ans, la modernité de sa conception surprend.
Ce mécanisme permet de représenter le ciel à un moment donné ou de déterminer une date à partir d’une configuration particulière du ciel. Il règle tous les mouvements des planètes visibles, du soleil et de la lune et en un seul mouvement, tourner la manivelle fait tourner l’ensemble du ciel jusqu’au moment qui nous intéresse. Selon Yanis, « c’est une représentation miniature et mécanique du cosmos. C’est à dire, ce qu’on appelle maintenant le système solaire ».
Reconstitution du mécanisme en 3D, d'après les études réalisées par le Projet de Recherche de la Machine d'Anticythère et la société Hublot.
(animation Seb Pouillard)
(animation Seb Pouillard)
Ce mécanisme perpétuel, qui compte pas moins de 300 pièces – engrenages miniatures accompagnés d’axes et de pièces finement dentées -, fonctionnerait toujours si on le remettait en état de marche. « Pour le concevoir, il fallait tout d’abord nécessairement savoir que la terre était une sphère et que les astres tournaient autour du soleil », ce qui ne pose pas de problème particulier à Yanis, pour lequel l’astronomie sphérique est établie depuis longtemps à cette date, « suite au moins aux travaux du mathématicien Euclide (actif vers 300 avant notre ère), puis à ceux du savant grec Autolycos de Pitane (né vers 360 avant notre ère) ». Yanis Bitsakis maîtrise son sujet : en tant que physicien tout d’abord, puis historien des sciences et techniques, il a les qualifications nécessaires. Cela fait maintenant de longues années qu’il étudie ce mécanisme en tant que Membre du Projet de Recherche de la Machine d’Anticythère.
Les concepteurs de cette machine connaissaient avec précision les cycles de chacune des planètes ainsi que le problème du décalage existant entre calendriers lunaire et solaire, identifié par le savant Grec Méton (Vème siècle avant notre ère), qui rend complexe la superposition de ces deux cycles en terme de calcul.
« Méton a remarqué qu’en 19 ans, soit 19 tours de la Terre autour du soleil, il y a très exactement 235 mois lunaires, et donc que cycle solaire et cycle lunaire coïncident. Un calcul qui sera affiné un siècle plus tard par Calipe de Cyzique, autre astronome Grec, qui remarquera que 4 fois le cycle de Méton, c’est à dire 76 – ou 4 x 19 – auquel l’on retranche un jour, donne une concordance beaucoup plus précise des cycles lunaire et solaire ». Yanis précise que « tous ces chiffres, le 19, le 235 et le 76, sont notés sur la machine », ce qui montre que ces connaissances étaient connues et maîtrisées, puisque la machine a été réalisée.
Mais pour se rendre compte de la complexité d’un mouvement, rien ne vaut l’avis d’un expert en complications, terme employé en Suisse pour désigner le mécanisme d’une montre.
Les concepteurs de cette machine connaissaient avec précision les cycles de chacune des planètes ainsi que le problème du décalage existant entre calendriers lunaire et solaire, identifié par le savant Grec Méton (Vème siècle avant notre ère), qui rend complexe la superposition de ces deux cycles en terme de calcul.
« Méton a remarqué qu’en 19 ans, soit 19 tours de la Terre autour du soleil, il y a très exactement 235 mois lunaires, et donc que cycle solaire et cycle lunaire coïncident. Un calcul qui sera affiné un siècle plus tard par Calipe de Cyzique, autre astronome Grec, qui remarquera que 4 fois le cycle de Méton, c’est à dire 76 – ou 4 x 19 – auquel l’on retranche un jour, donne une concordance beaucoup plus précise des cycles lunaire et solaire ». Yanis précise que « tous ces chiffres, le 19, le 235 et le 76, sont notés sur la machine », ce qui montre que ces connaissances étaient connues et maîtrisées, puisque la machine a été réalisée.
Mais pour se rendre compte de la complexité d’un mouvement, rien ne vaut l’avis d’un expert en complications, terme employé en Suisse pour désigner le mécanisme d’une montre.
Aujourd’hui directeur de la recherche et du développement de la marque Suisse Hublot, Mathias Buttet (interview intégrale ici) s’émerveille sur la technicité du mécanisme d’Anticythère depuis de nombreuses années maintenant, pour la bonne raison qu’il n’y a tout d’abord pas cru la première fois qu’il en a entendu parler. Mais il a du revoir sa position lorsqu’il a découvert l’objet au Musée d’Athènes, pour lequel d’ailleurs, Hublot a depuis financé la vitrine qui le contient, pouvant même résister, paraîtrait-il, à l’écroulement du musée.
Faisons taire les mauvaises langues : Hublot, qui n’a pas besoin de cela pour vendre ses montres avant même de les avoir fabriquées, a sponsorisé cette année la Coupe du Monde de Football et reproduire le mécanisme d’Anticythère n’est pas un moyen pour elle de se faire davantage de publicité. Lorsqu’elle s’attelle à un projet scientifique et technique important, en finançant ces coûteuses recherches, elle contribue aux avancées scientifiques en fournissant des études et du matériel, et son apport à la compréhension du mécanisme d’Anticythère, par le biais de Mathias Buttet et de Yanis Bitsakis, est considérable.
Lors de ma visite chez eux, j’ai eu la chance de découvrir quelques éléments du prototype du Bubblot, un drone sous-marin qu’ils développent pour aller sonder le reste de l’épave d’Anticythère, qui s’étend jusqu’à 100 mètres de fond et rend l’exploration humaine particulièrement difficile, car les plongeurs n’ont à cette profondeur qu’une autonomie très réduite.
L’ensemble du Bubblot, au design façon Minions, est composé d’un drone mère autour duquel devraient graviter 2 ou 3 drones satellites, tous reliés par des câbles, la communication radio étant impossible sous l’eau. Ces drones sont équipés de caméras stéréoscopiques et de nombreux capteurs, ainsi que d’un scanner 3D qui permettent de répertorier et de tracer avec soin chaque échantillon prélevé au sol. Le poste de pilotage se situe à 200 mètres de là, sur la côte, dans un fourgon aménagé en centre de commande, bardé de matériel de pointe : l’archéologie 3.0. Souvenez-vous en, lorsque nous parlerons de la légendaire cité de Kumari Kandam.
Faisons taire les mauvaises langues : Hublot, qui n’a pas besoin de cela pour vendre ses montres avant même de les avoir fabriquées, a sponsorisé cette année la Coupe du Monde de Football et reproduire le mécanisme d’Anticythère n’est pas un moyen pour elle de se faire davantage de publicité. Lorsqu’elle s’attelle à un projet scientifique et technique important, en finançant ces coûteuses recherches, elle contribue aux avancées scientifiques en fournissant des études et du matériel, et son apport à la compréhension du mécanisme d’Anticythère, par le biais de Mathias Buttet et de Yanis Bitsakis, est considérable.
Lors de ma visite chez eux, j’ai eu la chance de découvrir quelques éléments du prototype du Bubblot, un drone sous-marin qu’ils développent pour aller sonder le reste de l’épave d’Anticythère, qui s’étend jusqu’à 100 mètres de fond et rend l’exploration humaine particulièrement difficile, car les plongeurs n’ont à cette profondeur qu’une autonomie très réduite.
L’ensemble du Bubblot, au design façon Minions, est composé d’un drone mère autour duquel devraient graviter 2 ou 3 drones satellites, tous reliés par des câbles, la communication radio étant impossible sous l’eau. Ces drones sont équipés de caméras stéréoscopiques et de nombreux capteurs, ainsi que d’un scanner 3D qui permettent de répertorier et de tracer avec soin chaque échantillon prélevé au sol. Le poste de pilotage se situe à 200 mètres de là, sur la côte, dans un fourgon aménagé en centre de commande, bardé de matériel de pointe : l’archéologie 3.0. Souvenez-vous en, lorsque nous parlerons de la légendaire cité de Kumari Kandam.
« Des engrenages qui respirent. »
Concernant le niveau mathématique requis pour la conception du mécanisme d’Anticythère, il est stupéfiant, car il met en jeu des mouvements différentiels complexes. Pour Yanis, son concepteur avait derrière lui une longue tradition de calcul, qui lui a permis ce tour de force de parvenir à représenter, de manière extrêmement simple, des phénomènes complexes. Mécanisme qui ne peut en aucun cas, selon lui, être un coup d’essai.
Au problème du décalage entre calendrier solaire et lunaire, s’ajoute celui de l’orbite légèrement ellipsoïdale de la lune, non circulaire donc, qui lui donne depuis la Terre une vitesse variable. Un mouvement compliqué à reproduire avec des engrenages produisant des mouvements circulaires constants. C’est là que le génie entre en œuvre.
Je laisse la parole à l’amoureux des complications, Mathias Buttet, bien plus qualifié que moi : « Les roues s’engrènent l’une dans l’autre comme pour nous. Elles tournent, mais en tournant sur un satellite : ça on sait le faire aussi, c’est des engrenages planétaires. Mais pendant qu’elles tournent, elles vont s’éloigner donc on va mettre plus de temps pour aller chercher le flan des dents, donc on retarde. On va se rapprocher et aller un peu plus vite. Donc ils ont fait respirer ces engranges pendant qu’ils fonctionnaient, ils s’éloigner et ils se rapprochent. Et en fait qu’est ce que ça fait ? Ça change le rapport d’engrenages. Ils ont fait un truc absolument incroyable de simplicité puis en même temps c’est génial, on est passé complètement à côté dans notre civilisation ».
La résolution mécanique unique du problème de la vitesse variable de la lune, par le biais d’engrenages planétaires capables de « respirer » dans un mécanisme délicat, témoignent d’une maîtrise exceptionnelle de la science des engrenages, ainsi que des capacités du concepteur dans la réalisation de l’intégralité des pièces entrant dans ce mécanisme. Selon Mathias, il paraît difficile d’envisager que l’on puisse découvrir les techniques pendant que l’on tente de fabriquer cet objet, ce qui laisse imaginer que le concepteur maîtrisait à la fois l’astronomie, les mathématiques, la réalisation des engrenages et autres savoirs et techniques qui entrent dans la réalisation finale du mécanisme, jusqu’à son départ pour Rome. À qui était-il destiné ?
L’étendue du savoir mathématique nécessaire pour la conception de cet objet est également au-delà de celui que l’on attribue généralement aux Grecs anciens. Sans ce savoir, il leur aurait fallu procéder de manière empirique, c’est à dire par la fabrication de milliers de prototypes successifs pour parvenir à un résultat aussi précis. À nouveau, on ne dispose pas d’archives concernant ce mécanisme, ni aucune mention nulle part, si ce n’est peut-être dans le vague récit d’un astronome Grec.
D’un côté la théorie, de l’autre, la pratique. Comment sont-ils passés à la réalisation mécanique ? Car dans la pratique, c’est un peu plus compliqué que cela en a l’air. Prenons par exemple, la roue principale, qui comporte 223 dents : comment décomposer facilement un cercle en 223 parties égales, afin de créer des dents identiques ?
Au problème du décalage entre calendrier solaire et lunaire, s’ajoute celui de l’orbite légèrement ellipsoïdale de la lune, non circulaire donc, qui lui donne depuis la Terre une vitesse variable. Un mouvement compliqué à reproduire avec des engrenages produisant des mouvements circulaires constants. C’est là que le génie entre en œuvre.
Je laisse la parole à l’amoureux des complications, Mathias Buttet, bien plus qualifié que moi : « Les roues s’engrènent l’une dans l’autre comme pour nous. Elles tournent, mais en tournant sur un satellite : ça on sait le faire aussi, c’est des engrenages planétaires. Mais pendant qu’elles tournent, elles vont s’éloigner donc on va mettre plus de temps pour aller chercher le flan des dents, donc on retarde. On va se rapprocher et aller un peu plus vite. Donc ils ont fait respirer ces engranges pendant qu’ils fonctionnaient, ils s’éloigner et ils se rapprochent. Et en fait qu’est ce que ça fait ? Ça change le rapport d’engrenages. Ils ont fait un truc absolument incroyable de simplicité puis en même temps c’est génial, on est passé complètement à côté dans notre civilisation ».
La résolution mécanique unique du problème de la vitesse variable de la lune, par le biais d’engrenages planétaires capables de « respirer » dans un mécanisme délicat, témoignent d’une maîtrise exceptionnelle de la science des engrenages, ainsi que des capacités du concepteur dans la réalisation de l’intégralité des pièces entrant dans ce mécanisme. Selon Mathias, il paraît difficile d’envisager que l’on puisse découvrir les techniques pendant que l’on tente de fabriquer cet objet, ce qui laisse imaginer que le concepteur maîtrisait à la fois l’astronomie, les mathématiques, la réalisation des engrenages et autres savoirs et techniques qui entrent dans la réalisation finale du mécanisme, jusqu’à son départ pour Rome. À qui était-il destiné ?
L’étendue du savoir mathématique nécessaire pour la conception de cet objet est également au-delà de celui que l’on attribue généralement aux Grecs anciens. Sans ce savoir, il leur aurait fallu procéder de manière empirique, c’est à dire par la fabrication de milliers de prototypes successifs pour parvenir à un résultat aussi précis. À nouveau, on ne dispose pas d’archives concernant ce mécanisme, ni aucune mention nulle part, si ce n’est peut-être dans le vague récit d’un astronome Grec.
D’un côté la théorie, de l’autre, la pratique. Comment sont-ils passés à la réalisation mécanique ? Car dans la pratique, c’est un peu plus compliqué que cela en a l’air. Prenons par exemple, la roue principale, qui comporte 223 dents : comment décomposer facilement un cercle en 223 parties égales, afin de créer des dents identiques ?
C’est évidemment possible, mais nécessite un certain équipement et la maîtrise de techniques, qui permettront de transformer une plaque de bronze en une roue d’engrenage très précisément dentée. Manifestation concrète de savoirs et d’une totale maitrise technique, ce mécanisme pour nous unique est époustouflant. Mais selon Yanis, ce mécanisme n’était pas un objet unique et il envisage qu’il en ait pu exister des dizaines. Selon le physicien Grec Xénophon Moussa – qui hélas ne figurera pas dans le film à cause de la piètre qualité du son de l’interview due au vent fort qui soufflait ce jour-là -, il aurait été retrouvé en Irlande un fragment de roue dentée en bois, identique au fragment principal de la roue principale du mécanisme d’Anticythère, laissant envisager qu’elle ait également pu être réalisée dans ce matériau.
Yanis évoque l’écrit de Géminos, un astronome Grec vivant aux temps du naufrage d’Anticythère, qui livre une description de son fonctionnement sans toutefois nommer son concepteur ni donner d’informations sur sa fabrication.
S’il fallait une preuve que les outils ou machines ne survivent pas au temps, l’Anticythère donne à réfléchir… c’était il y a seulement 2.000 ans. Pour les débuts de l’Égypte, il nous faut remonter encore 3.000 ans plus tôt. Nous n’avons eu connaissance de cet objet que parce que nous avons eu la chance de le repêcher dans une épave : si le bateau n’avait pas coulé, jamais nous ne l’aurions connu car nous n’en avions aucun exemplaire – qui ont probablement dû être refondus en temps de guerre – et nous ne savions même pas qu’il avait existé.
Comment un épisode majeur de l’ingénierie humaine a-t-il pu disparaître de notre Histoire ?
Nous n’avions pas seulement perdu l’objet, mais l’idée même qu’il ait un jour existé, et cela, en moins de 2.000 ans… Mais plutôt que de nous surprendre et mobiliser la recherche et l’envie de comprendre comment un tel objet a pu être pensé et réalisé en ces temps reculés, cette découverte ne semble pas émouvoir davantage dans les rangs de l’archéologie. Selon Yanis, l’on admet au mieux des compétences aux Grecs en matière d’architecture, car il est difficile de passer à côté de l’Acropole, mais pour ce qui est des anciens, on leur prête davantage l’art de la théorie que celui de la pratique. Idée balayée par ce mécanisme, témoignant au contraire d’une grande maîtrise technique, plutôt anachronique selon ce que nous en dit notre Histoire.
Au vu du nombre de problèmes que ce mécanisme soulève, certains préfèrent tenter de le disqualifier en tenter de le reléguer au rang de « fake historique ». Selon le Docteur en physique et enseignant Frédéric Lequèvre (« L’ordinateur d’Archimède, Anticythère ou le naufrage d’un mythe », Frédéric Lequèvre, deux petits livres pdf à 8,5€ l’unité), ce mécanisme daterait du XVIème siècle et n’aurait rien à voir avec l’épave d’Anticythère. En remettant en cause le sérieux de l’archéologie grecque du début du XXIème siècle, en évoquant des « circonstances troubles » autour de la découverte, l’absence de rapport des plongeurs et suggérant même de possibles motivations nationalistes, il émet l’hypothèse que le mécanisme – qui aurait également séjourné sous l’eau, donc – se serait par hasard retrouvé parmi les objets de l’épave.
Pour preuve, ce mécanisme ne correspondrait tout d’abord pas aux savoirs des Grecs anciens à cette époque mais davantage à ceux de l’horlogerie européenne du XVIème siècle, et la corrosion du métal employé laisserait entendre qu’il pourrait ne pas être fait de bronze mais de laiton, alliage inconnu en – 60 avant notre ère mais typique du XVIème siècle. En fin d’ouvrage, la société Hublot se voit presque accusée de fausser les résultats pour promouvoir son business – elle qui sponsorise la Coupe du Monde de Football qui attire bien plus de spectateurs que le mécanisme d’Anticythère – et le dernier chapitre du livre termine directement sur une critique des adeptes de « l’Atlantide et les extraterrestres », histoire de bien clore le dossier au cas où l’on n’aurait pas compris.
La question de la nature du métal est très intéressante, mais fausse dans ses conclusions selon Yanis. En revanche, déplacer cet objet au XVIème siècle ne consiste qu’à déplacer dans le temps le silence anormal qui entoure sa conception et sa réalisation. Par qui ? Où ? Comment ? Où se trouveraient les dessins, les prototypes et les archives ?
De cette époque récente bien documentée qu’est le seizième européen, nous ne disposerions d’aucune information sur son concepteur ? Sur l’objet ? Aurait-il mis au point cette particularité complexe du système de la « respiration des engrenages » qui force l’admiration de spécialistes, tout seul, sans en parler à quiconque ni montrer son mécanisme terminé ? Parfaitement au fait de l’évolution des techniques horlogères, Mathias Buttet n’aurait pas identifié le ou les concepteurs possibles du Moyen-Âge ? Et en seulement 4 siècles, tout se serait perdu ?
Si l’on suit bien la thèse de Lequèvre, il nous faudrait donc envisager que le mécanisme aurait été conçu et réalisé au XVIème siècle on ne sait où – mais dans la plus grande discrétion puisque nous n’avons aucune archive – puis qu’il se serait ensuite retrouvé en Grèce, sur un bateau qui l’aurait perdu au large de l’île d’Anticythère, pile au-dessus de l’épave du bateau grec, pour être remonté des siècles plus tard par des pêcheurs grecs, à moins qu’il n’ait été découvert ailleurs et se soit par hasard retrouvé négligemment mêlé à ceux de l’épave d’Anticythère dans le musée d’Athènes, ou encore qu’il s’agisse d’un canular à but lucratif, et qu’ainsi serait née la légende du « mécanisme d’Anticythère ». Les arguments étants posés, je vous invite à découvrir le travail* de Frédéric Lequèvre afin de vous faire votre propre opinion.
Il existe cependant un fait qui permet de dater avec certitude l’ancienneté du mécanisme : il fera l’objet d’une publication scientifique prochaine. Toujours est-il que juste avant de repartir d’Athènes, à deux pas de l’Acropole, sur la colline des Nymphes, je n’ai même pas été surpris de voir de tels assemblages de blocs de pierre massifs.
Yanis évoque l’écrit de Géminos, un astronome Grec vivant aux temps du naufrage d’Anticythère, qui livre une description de son fonctionnement sans toutefois nommer son concepteur ni donner d’informations sur sa fabrication.
S’il fallait une preuve que les outils ou machines ne survivent pas au temps, l’Anticythère donne à réfléchir… c’était il y a seulement 2.000 ans. Pour les débuts de l’Égypte, il nous faut remonter encore 3.000 ans plus tôt. Nous n’avons eu connaissance de cet objet que parce que nous avons eu la chance de le repêcher dans une épave : si le bateau n’avait pas coulé, jamais nous ne l’aurions connu car nous n’en avions aucun exemplaire – qui ont probablement dû être refondus en temps de guerre – et nous ne savions même pas qu’il avait existé.
Comment un épisode majeur de l’ingénierie humaine a-t-il pu disparaître de notre Histoire ?
Nous n’avions pas seulement perdu l’objet, mais l’idée même qu’il ait un jour existé, et cela, en moins de 2.000 ans… Mais plutôt que de nous surprendre et mobiliser la recherche et l’envie de comprendre comment un tel objet a pu être pensé et réalisé en ces temps reculés, cette découverte ne semble pas émouvoir davantage dans les rangs de l’archéologie. Selon Yanis, l’on admet au mieux des compétences aux Grecs en matière d’architecture, car il est difficile de passer à côté de l’Acropole, mais pour ce qui est des anciens, on leur prête davantage l’art de la théorie que celui de la pratique. Idée balayée par ce mécanisme, témoignant au contraire d’une grande maîtrise technique, plutôt anachronique selon ce que nous en dit notre Histoire.
Au vu du nombre de problèmes que ce mécanisme soulève, certains préfèrent tenter de le disqualifier en tenter de le reléguer au rang de « fake historique ». Selon le Docteur en physique et enseignant Frédéric Lequèvre (« L’ordinateur d’Archimède, Anticythère ou le naufrage d’un mythe », Frédéric Lequèvre, deux petits livres pdf à 8,5€ l’unité), ce mécanisme daterait du XVIème siècle et n’aurait rien à voir avec l’épave d’Anticythère. En remettant en cause le sérieux de l’archéologie grecque du début du XXIème siècle, en évoquant des « circonstances troubles » autour de la découverte, l’absence de rapport des plongeurs et suggérant même de possibles motivations nationalistes, il émet l’hypothèse que le mécanisme – qui aurait également séjourné sous l’eau, donc – se serait par hasard retrouvé parmi les objets de l’épave.
Pour preuve, ce mécanisme ne correspondrait tout d’abord pas aux savoirs des Grecs anciens à cette époque mais davantage à ceux de l’horlogerie européenne du XVIème siècle, et la corrosion du métal employé laisserait entendre qu’il pourrait ne pas être fait de bronze mais de laiton, alliage inconnu en – 60 avant notre ère mais typique du XVIème siècle. En fin d’ouvrage, la société Hublot se voit presque accusée de fausser les résultats pour promouvoir son business – elle qui sponsorise la Coupe du Monde de Football qui attire bien plus de spectateurs que le mécanisme d’Anticythère – et le dernier chapitre du livre termine directement sur une critique des adeptes de « l’Atlantide et les extraterrestres », histoire de bien clore le dossier au cas où l’on n’aurait pas compris.
La question de la nature du métal est très intéressante, mais fausse dans ses conclusions selon Yanis. En revanche, déplacer cet objet au XVIème siècle ne consiste qu’à déplacer dans le temps le silence anormal qui entoure sa conception et sa réalisation. Par qui ? Où ? Comment ? Où se trouveraient les dessins, les prototypes et les archives ?
De cette époque récente bien documentée qu’est le seizième européen, nous ne disposerions d’aucune information sur son concepteur ? Sur l’objet ? Aurait-il mis au point cette particularité complexe du système de la « respiration des engrenages » qui force l’admiration de spécialistes, tout seul, sans en parler à quiconque ni montrer son mécanisme terminé ? Parfaitement au fait de l’évolution des techniques horlogères, Mathias Buttet n’aurait pas identifié le ou les concepteurs possibles du Moyen-Âge ? Et en seulement 4 siècles, tout se serait perdu ?
Si l’on suit bien la thèse de Lequèvre, il nous faudrait donc envisager que le mécanisme aurait été conçu et réalisé au XVIème siècle on ne sait où – mais dans la plus grande discrétion puisque nous n’avons aucune archive – puis qu’il se serait ensuite retrouvé en Grèce, sur un bateau qui l’aurait perdu au large de l’île d’Anticythère, pile au-dessus de l’épave du bateau grec, pour être remonté des siècles plus tard par des pêcheurs grecs, à moins qu’il n’ait été découvert ailleurs et se soit par hasard retrouvé négligemment mêlé à ceux de l’épave d’Anticythère dans le musée d’Athènes, ou encore qu’il s’agisse d’un canular à but lucratif, et qu’ainsi serait née la légende du « mécanisme d’Anticythère ». Les arguments étants posés, je vous invite à découvrir le travail* de Frédéric Lequèvre afin de vous faire votre propre opinion.
Il existe cependant un fait qui permet de dater avec certitude l’ancienneté du mécanisme : il fera l’objet d’une publication scientifique prochaine. Toujours est-il que juste avant de repartir d’Athènes, à deux pas de l’Acropole, sur la colline des Nymphes, je n’ai même pas été surpris de voir de tels assemblages de blocs de pierre massifs.
Soit le hasard est tenace, soit ces peuples ont tous appris d’une même source.
(extraits tirés du livre BAM)
(extraits tirés du livre BAM)
Extrait de l’interview de Yanis Bitsakis
Extrait de l’interview de Mathias Buttet